Echo des Paroisses de l’Issole – 01/11/2018
EDITO : In memoriam!
En mémoire… Pour la mémoire… Dans la mémoire… La traduction de « In memoriam » pourrait se rapporter à ces expressions françaises qui ne disent pas toujours la même chose selon la sémantique et le génie de la langue de Molière. Dans le vocabulaire de l’Eglise, « In memoriam » est chargé de sens. La mémoire révèle et traduit le mystère de l’Eglise, son essence et sa mission à travers l’histoire des hommes.
« L’Eglise fait Mémoire et la Mémoire fait l’Eglise » ! Il s’agit de l’actualisation d’un Evènement historique et de foi : La Pâques de Notre Seigneur Jésus-Christ ! Cet Evènement est primordial dans la vie de l’Eglise et la foi des fidèles. « Faites ceci en mémoire de moi ». L’Eglise rappelle, célèbre et actualise cette présence actuelle de Dieu, se nourrit d’elle et la témoigne. Déjà dans l’Ancien Testament, cet Evènement fondateur préfigurait la sortie d’Egypte (La pâque juive) : Dieu demandera alors à son peuple de se le rappeler, de l’enseigner aux enfants de leurs enfant…( Dt 6,7), de le commémorer en somme.
Au long des siècles, l’Eglise ne rappelle pas seulement un simple fait du passé mais témoigne de cet Evènement et fait habiter l’humanité dans cette Présence de Dieu. Les Saints sont les témoins de cette vie de foi qu’ils célèbrent en chantant sans fin la louange du Seigneur dans les cieux (Préface de la Toussaint)
La Mémoire de ce mois de Novembre 2018 est aussi un hommage aux milliers de victimes de la Grande Guerre. Cent ans après, nous voulons faire mémoire selon l’esprit de Judas dans le livre des Maccabées « Les soldats qui sont tombés pour la patrie ne sont pas morts pour rien… » (2M 12, 38-45).
Ce chef de guerre prophétique a prié pour les victimes tombées sur le champ de bataille, signe d’une vie qui repose en Dieu et avec Dieu. Pour lui, faire mémoire est un hommage mérité, une reconnaissance pour le sacrifice assumé et rendu ! Point n’est besoin de rappeler les horreurs de cette guerre portée par une idéologie barbare et les victimes collatérales occasionnées.
L’armistice fut la prise de conscience d’une guerre qui transforma le monde entier en un vaste cimetière à ciel ouvert. Peut-on parler de vainqueurs et de vaincus ? Je crois que c’est un discours dépassé ! Ce qui importe aujourd’hui, ce n’est plus l’euphorique des prétendus vainqueurs, mais la reconstruction des brèches restées ouvertes, le pansement des plaies béantes cent ans plus tard et de dire : « plus jamais ça… ! L’humanité mérite mieux que ça… ! » Mais avons-nous suffisamment intégrer la leçon d’une telle guerre aux conséquence mondiales insoupçonnées ?
Gare à nos cœurs oublieux !!! Car dans notre monde plane encore l’ombre de la discorde ourdie, de la résurgence des idéologies nouvelles, de la haine ruminée, d’une mauvaise répartition des richesses du monde, d’une économie à deux vitesses… Des guéguerres qui pourraient, à tout moment, donner naissance à la guerre. Notre monde assiste-t-il impuissamment à l’écoulement de petits ruisseaux qui vont se jeter dans la mer qui nous submergera par la suite ?
1918-2018 ! Les cloches sonneront à la volée pour un appel mémorial… Les fanfares distilleront leur son aigüe… Ce 11 novembre, le monde entier trace le tronçon de la Paix ! Une telle mémoire ne saurait être une grande parade militaire avec fanfares et trompettes, mais la construction de digues bien fortifiées pour éviter à notre monde une autre catastrophe bien pire que la première ! Nos trompettes, au lieu de sonner une musique de vainqueurs, doivent plutôt alerter les consciences des générations futures au sujet des guerres d’un nouveau genre qui se trament !
Entre hommage et prise de conscience, faire mémoire devient une mission collective soutenue par l’espérance de nos faits et gestes. Ainsi le mémorial de la Pâques du Seigneur nous propulsera au-devant d’une vie glorieuse et bienheureuse (la béatitude céleste). Une vie que demandait déjà Judas pour les soldats morts pour la patrie. Une vie que nous, fidèles et hommes de bonne volonté, implorons avec une gerbe de fleur ou une bougie pour nos proches défunts : in memoriam aeternam !
En nous inclinant sur la tombe du soldat inconnu, symbole de notre vie qui, un jour, connaitra certainement un terme, contemplons le sacrifice du Christ, sa Pâques et la nôtre !
Père Dieudonné MASSOMA, Curé